« Je parle comme une rivière », un album d’une grande force mais plein de douceur

Titre : Je parle comme une rivière

Auteur : Jordan Scott

Illustrateur : Sydney Smith

Éditions : Didier Jeunesse

Publication : 1er Septembre 2021

Genre : Album Jeunesse poétique

Thèmes : Timidité, Bégaiement, Nature

Pages : 52

Prix : 14€90


Résumé :

« Et si les mots restaient toujours coincés ? Et s’ils ne sortaient jamais comme vous le vouliez ? Quand un garçon qui bégaie se sent isolé, seul et incapable de communiquer comme il le voudrait, une promenade au bord de la rivière avec son papa l’aide à retrouver sa voix. »


Mon avis :

« Je parle comme une rivière » est de ces albums qui marquent par leurs justesses et leurs sincérités. Empreint d’une grande finesse tant dans les mots que dans les choix de narration visuelle, cet album aborde avec aisance et simplicité le bégaiement, mais surtout l’aide, presque silencieuse et contemplative, offerte par un père aimant et généreux.

L’histoire que nous découvrons au coeur de cet album immersif est celle d’un petit garçon bègue. Chaque matin, il contemple les bruits des mots, celui qu’ils font lorsqu’ils restent coincés et ne se forment pas avec la fluidité attendue. Incapable de communiquer comme il le voudrait, il se sent isolé et ne parvient pas à partager ses histoires. Seulement, une promenade au bord de la rivière avec son papa, après une journée difficile, l’aide à trouver sa voix…

Jordan Scott nous partage, dans « Je parle comme une rivière », sa propre expérience à travers un travail rigoureux concernant la transcription écrite du bégaiement. Le lecteur bute alors sur les consonnes, s’attarde sur les aspérités des mots et questionne son rapport à la langue et à l’acte, qui semble trop souvent anodin, de la prise de parole. Peu à peu les pages se succèdent, s’ouvrant sur le monde et plus particulièrement sur celui de la rivière, sauvage, vive, calme, pas toujours fluide. Portant le lecteur avec légèreté, les mots dessinent la métaphore, sujet de l’album, et engage avec naturel une comparaison rassurante et vive entre la rivière, inégale et indomptable et le bégaiement qui semble entraver le garçon au début de l’album. Car comme l’indique le titre : le garçon parle comme une rivière ; est une métaphore retranscrite à travers la narration tant visuelle que textuelle.

Il est important de noter que cette histoire n’est pas celle d’une « guérison ». Elle oriente le lecteur vers l’acceptation et l’appréciation du bégaiement pour ce qu’il est : une narration propre à chacun, belle et partagée. C’est d’ailleurs avec les planches saisissantes et habillées d’une sensibilité propre à une narration visuelle métaphorique que la beauté du message s’inscrit dans le coeur des lecteurs.

La touche trouble, douce, parfois évasive ou sèche de Sydney Smith offre des planches vibrantes et surtout vivantes. Les images sont tant époustouflantes pour la maitrise sauvage dont elles recèlent, qu’apaisantes pour la palette colorée qu’elles explorent. Entre jeux de reflets sur l’eau, contre-jour et halos, il est indéniable que la lumière fascine cet illustrateur, qui parvient à en rendre l’éclat sur chacune de ses propositions visuelles. Impossible de ne pas s’immerger dans ce style illustratif si doux et naïf. Appliquant une approche cinématographique dans les cadrages, la narration prend des allures de court-métrage, laissant les lecteurs découvrir le storyboard poétique d’une oeuvre intimiste, narré à la première personne.

C’est avec beaucoup de sentiments que je vous recommande de découvrir cet album qui est un énorme coup de coeur (pour de nombreuses raisons que vous aurez certainement comprise en me lisant) !

Une réflexion sur “« Je parle comme une rivière », un album d’une grande force mais plein de douceur

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