La poésie et la brutalité de la migration écrite par Cécile Alix dans « A(ni)mal », un coup de coeur !

Titre : A(ni)mal

Autrice : Cécile Alix

Éditions : Slalom

Publication : 3 février 2022

Genre : Roman Contemporain Young Adult

Thèmes : Migration, Famille, Voyage, Guerre, Violence

Pages : 304

Prix : 14€95


Résumé :

Je suis un homme
 » Tu ne dis pas d’où tu viens, tu ne dis pas ton nom, tu oublies ton pays, compris ? Tu m’oublies. Et tous les autres que tu connais, que tu as connus, tous, tu les oublies aussi. Et qui tu es, tu l’oublies. À partir de maintenant, tu n’es personne, tu n’es de nulle part. À toi de redevenir quelqu’un, c’est possible. C’est possible, tu m’entends ? À ton âge, tout est possible. « 

Avoir 15 ans dans un pays en guerre, être forcé de devenir un homme, se retrouver projeté sur les chemins de la clandestinité, effleurer les limites de l’humanité, apprendre à survivre, s’effacer, oublier…

Puis
Vivre – à nouveau
Ressentir – encore
Faire confiance – petit à petit
Garder espoir – toujours

Le parcours d’un migrant, des difficultés indicibles de son voyage jusqu’à la résilience.


Mon avis :

Roman coup de poing, aussi fascinant pour sa plume que terrible et empreint d’espoir pour l’histoire qu’il raconte, « A(ni)mal, le nouveau livre de Cécile Alix est ces lectures qui marquent à vie. C’est avec beaucoup d’émotion que les mots s’y déploient pour offrir une lecture poignante, brutale et poétique, contant autant l’horreur que l’espérance d’un cheminement vers une liberté rêvée.

« A(ni)mal » est l’histoire d’un jeune adolescent contraint de fuir pour survivre, laissant derrière lui son identité en devenir mais aussi sa famille, son insouciance de jeunesse et tout ce qui le rattachait à son passé. Ce roman est une bouleversante épopée où l’entraide s’amenuise, laissant place à la noirceur, malgré la force positive qui habite le personnage principal, devenu homme pour franchir les terres qui la sépare de la Méditerranée.

« Je suis un homme, je suis un homme, je suis un homme, je me répète. »

D’abord sans nom, dépouillée d’identité, nous faisons connaissance avec celui qui, pages après pages devient Miran. C’est au coeur d’une scène de séparation que l’adolescent, dont le nom est écrit sur des jerricans, cheveux désormais rasés et les économies scotchées au corps, s’éveille au lecteur. Il prend le départ pour un ailleurs. Nous ne savons pas d’où il vient… Mais il veut rejoindre la France. Pour y parvenir, le garçon va côtoyer l’enfer.

« J’ai soudain la certitude que je ne la reverrai plus. C’est un désespoir sans fin, une sensation de dernière fois. Le commencement d’un deuil. Mon enfance se meurt. »

« La lune refusait de nous voir quitter le pays et fermait son oeil de cyclope. en guise d’adieu, elle ne consentait à nous offrir que l’arc imperceptible d’une paupière close. Je l’aurais voulu ronde et lumineuse, comme un phare. »

« Paris c’est le Paradis » On ne condamne pas quelqu’un a l’enfer au nom du paradis. »

Il se fait muet. Petit. Homme. Pour survivre. Car les chemins indéfinis et sinueux vers l’Europe empoignent l’humanité des clandestins qui les parcourent. Il n’y a alors pour Miran, plus que la survie.

La plume de Cécile Alix est volatile, travaillée et empreinte d’un rythme émouvant. Jouant des rythmes et sonorités pour marquer les esprits, elle fait vibrer les pensées de Miran, s’accordant aux émotions qui traversent son personnage, lui offrant une voix alors que tout ce qui l’entoure pendant son sordide voyage lui inculque que disparaitre est la seule solution.

« Dans le ciel des milliard s d’étoiles, à terre les dormeurs enroulés dans leurs haillons. L’indicible beauté d’une nuit étoilée, l’amère réalité de notre camp d’exilés. Sous mes yeux, le monde divisé en deux. Une moitié que l’on dit créée par la main de Dieu, l’autre jetée là par la main de l’homme. »

« Une valise c’est le passé et l’avenir, un ancrage et une promesse. »

Il semble impossible de ressortir indemne de ce livre. Les larmes accompagnent le lecteur qui pleure la beauté de Miran, sa survie et sa poésie. Cette histoire et ses mots émerveillent. Elle partage un tabou, une vérité criante et nécessaire. Mais pour comprendre l’émotion débordante que dégage « A(ni)mal », il faut le lire. Vraiment.

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